Avec cette farce, Bourvil continue de s'éloigner de l'image donnée par ses rôles des années 40. Le film fait scandale auprès des milieux catholiques notamment, il sera interdit aux moins de 18 ans, parfois aux moins de 21 ans, et même interdit totalement en Corrèze.
On peut espérer tout de même que le scandale attirera aussi des curieux, par contre Bourvil ne ramènera pas le public familial cette fois-ci. Cependant, trois ans plus tôt, "La traversée de Paris" (également réalisé par Autant-Lara, également d'un roman de Marcel Aymé) avait déjà prouvé que Bourvil pouvait attirer (certes en duo avec Gabin) en dehors de ses rôles légers; et le grand public a découvert un Bourvil totalement crédible dans un rôle dur (Thénardier) dans "Les misérables" l'année précdente.

Son exclusivité parisienne commence bien, sur deux salles, avec 46 057 entrées sur 6 jours (sortie le 29 octobre). En ajoutant deux salles d'exclusivité en province, sa seconde semaine confirme la curiosité pour le film, avec 62 348 entrées de plus.
L'attente est là, le casting (Bourvil, mais aussi Francis Blanche, Yves Robert et un casting féminin charmant), l'auteur et le scandale ont un effet positif sur la curiosité des premiers spectateurs, et en élargissant sa diffusion à 18 salles d'exclusivité à travers la France, le film prend la tête du box office hebdomadaire avec 203 530 entrées et a toujours une très bonne moyenne par salle (aidé aussi par le mercredi 11 novembre).
La semaine suivante, de nouvelles villes découvrent le film, avec 34 copies, et c'est encore 246 948 entrées, le film cumule déjà 558 883 entrées, malgré les interdictions et les appels à boycotter le film.
Avec 35 salles et 210 083 entrées, "La jument verte" est pour la troisième fois premier de la semaine. Puis il baisse logiquement, toujours sur 36 salles, avec 139 290 entrées, puis 143 485 entrées, ce qui lui permet de franchir le million en seulement 7 semaines. Sa carrière d'exclusivité est un franc succès, on verra s'il tiendra bien en seconde partie de carrière, puis en salles de quartier, puis en reprises éventuelles.

Sans surprise, le film n'est que peu programmé pendant les vacances familiales de Noël, à l'inverse du "Bossu" (Jean Marais + Bourvil dans un rôle bien plus familial).
Fin janvier "La jument verte" redevient premier hebdomadaire, et en profite pour passer les 1,5M. Puis fin mars il passe les 2M; sa carrière est bonne, il peut rejoindre au final les 4M qu'a déjà atteint "La traversée de Paris".
Sa tournée française continue, et en mai il dépasse les 2,5M d'entrées.

Sa carrière dans les salles de quartier est plus discrête. Après 12 mois d'exploitation, il est le cinquième plus gros succès parmi les sorties de 1959 sur cette durée d'exploitation, et sur 24 mois il est sixième (dépassé par "Salomon et la reine de Saba").
Fin 1960 il cumule 3 071 290 entrées, et après 24 mois il atteint 3 274 784 entrées.

En 1961, il ajoute un joli score de 275 488 entrées à son box office, cumulant 3 346 778 entrées.
En 1962, c'est encore 144 115 entrées, cumul de 3 490 893, certes loin d'être un champion, mais un franc succès.
En 1963, le film ressort, avec 294 370 entrées, il cumule maintenant 3 785 263 entrées, repassant devant "Salomon et la reine de Saba".
En 1964 il poursuit sa reprise avec encore 126 252 entrées, et un cumul de 3 911 515 entrées.
Et en 1965 il ressort de nouveau avec 210 730 entrées, et un cumul de 4 122 245 entrées, dépassant Gabin et son "Archimède le clochard", pour occuper la quatrième place.
Et ce n'est pas fini car les trois années suivantes il se maintient très bien, toujours très vu, avec 194 903, 182 278 puis 188 427 entrées, il cumule alors 4 687 853 entrées! Et il bat Brigitte Bardot et sa "Babette s'en va en guerre" pour être troisième des sorties de 1959, derrière Fernandel et sa "Vache et le prisonnier" et le duo Jean Marais + Bourvil du "Bossu". Une sacrément belle année pour Bourvil, avec deux rôles très différents et deux énormes succès.
En 1969, "La jument verte" attire encore, malgré ses 10 ans d'âge, avec 120 310 entrées de plus, et un cumul de 4 808 163 entrées.
Et en 1970, il est repris de nouveau, avec encore 151 252 entrées puis 127 572 entrées en 1971; il cumule alors 5 086 987 entrées!
Les moeurs et la mode ont bien changé en 12 ans, et le film ne choque plus du tout, mais malgré ça il sera encore vu les années suivantes : 56 412 en 1972, 49 139 en 1973, 46 642 en 1974, 25 833 en 1975, et encore 26 703 spectateurs de 1976 à 1978.
Il aura réalisé plus de 2 millions d'entrées après ses 24 premiers mois d'exploitation! Cette année-là, seuls "La vache et le prisonnier" (et ses 8,85M d'entrées final!) et "La belle au bois dormant" (avec ses reprises dignent d'une nouvelle sortie) ont réussi à faire plus au-delà de leurs 24 premiers mois.

En 1987, "La jument verte" deviendra le quatrième plus gros succès des films sortis en 1959, dépassé par "La belle au bois dormant", lors de sa quatrième reprise nationale.